Ne soyez plus bourreau, acceptez votre peur
- Le 10/04/2019
- Dans Articles de fond
Nous avons tous vu une personne se faire surprendre, sursauter, et immédiatement réagir en bousculant le responsable. Si par la suite les rires ont tenté de masquer la frayeur le premier réflexe aura malgré tout été la violence. Ce geste est socialement toléré car l´émotion provoquée est clairement identifiée et que d´une certaine façon elle l´explique, voire l´excuse. Mais qu´en est-il des violences dont nous ne discernons pas la raison ? Peut-on imaginer qu´elles soient toutes des réponses à une peur et qu´elles puissent être d´autant plus grandes que celle-ci est inconsciente ?
Nous allons partir de l'hypothèse que toutes les maltraitances physiques ou psychologiques, la prise de pouvoir sur d´autres êtres humains, le mensonge, les guerres, les trahisons, l´infidélité à soi ou à l´autre, l´irrespect, le racisme, sont originellement des attitudes défensives répondant à des peurs non conscientes.
Vérification .…
Les petites peurs génèrent de petites violences. J´ai peur de mon voisin étranger, je vais le tenir à distance même s´il exprime le souhait de venir vers moi. J´ai peur de la réaction de mon ami si je lui avoue la vérité, je vais lui mentir. J´ai peur de vieillir, je vais me tromper et tromper ma femme avec une autre plus jeune. Liste de violences communes qui jalonne notre vie de petits dépits plus ou moins conscients de nous voir les commettre.
De petites peurs accolées à de grandes ambitions peuvent provoquer de grandes violences. Nous avons peur de ce pays, de sa trop grande différence de culture que nous n´arrivons ou ne voulons pas comprendre. Nous cacherons notre peur derrière un intérêt politique, économique ou sécuritaire pour pouvoir lui faire la guerre. La violence est montée d´un cran et elle est partagée. Nos mécanismes d´auto-défense vont un peu plus nous couper de notre responsabilité individuelle d´y avoir participé.
Mais les plus grandes violences naissent clairement de nos plus grandes peurs et elles seront d´autant plus terribles que l´infernal tandem agit dans l´ombre, potentiellement sous l´égide d´un ego malmené. Sans conscience d´une telle emprise nous nous trouvons déconnecté de toute responsabilité et particulièrement handicapés pour y mettre fin.
Les hommes ont prioritairement à s´en préoccuper. Nous sommes à l´origine de la plupart des violences de ce monde, réalité facile à vérifier en interrogeant un simple moteur de recherche. Á nous de comprendre pourquoi. Nous avons à identifier la mère de toutes les peurs, la plus primaire, la plus universelle, celle qui du plus profond de notre être pousse nos actes à endeuiller l´humanité.
La plus grande des peurs est issue de la confrontation à la mort. Enfouie dans la frénésie de nos vies, la moins conscientisée possible voire la plus refoulée, la question de notre existence au-delà de la frontière est le terreau de la plus viscérale des peurs. Même posée avec moins d´urgence tout au long de notre vie, elle est bien là, tapie au plus profond. Il n'y a rien de plus vital que le sentiment d´exister.
Notre société est encore bipolarisée entre féminin et masculin. Sans un minimum de conscience, pour nous rassurer sur l´importance de notre rôle nous confrontons notre statut d´homme à celui de notre alter ego féminin. Si la question ne semble pas particulièrement présente dans l´esprit de la plupart d'entre nous, elle accomplit quand même en tâche de fond son petit travail destructeur. Depuis des millénaires nous sommes sous l'emprise de ce détestable petit jeu de la comparaison auquel nous ne jouons pas forcément consciemment mais dont nous supportons inconsciemment les résultats. Le problème est qu´il nous donne perdant à cent contre un.
Sur le ring, à ma droite, l´homme que l´évolution de la société moderne prive chaque jour un de plus de son rôle de protecteur et de pourvoyeur de gibier, encore détenteur du titre de fécondeur. Á ma gauche la femme, qui met au monde la totalité de notre humanité, est en connexion directe avec l´universel par périodes reconductibles de neuf mois, naturellement source d´amour et de compassion. Un match régit par d´aussi mauvaises règles amènera toujours au même résultat, au même apparent perdant. Comment ne pas être envahi par la plus grande des peurs quant à la valeur de notre existence ? Juste impossible.
Pour essayer de nous rassurer et enfouir ce déjà potentiel sentiment d´infériorité, notre plus grande erreur a été de nous égarer sur le chemin du pouvoir et du contrôle. Nous nous y sommes précipités. C´est donc chargés de cette peur au ventre et du plus mauvais des remèdes que nous avons généré pendant des millénaires les plus grandes violences.
Première et évidente cible, la femme. Nous avons pris le contrôle de sa vie, lui avons imposé de nous appartenir, de mettre notre nom sur le sien, sur celui nos enfants, de limiter ses moyens d´expression, de les dévaloriser au travail, au volant, de les voiler, de les violer, de les lapider, de les bruler, et de milliers d´autres façons encore. Une entreprise d´asservissement massif, à l´échelle planétaire, que nos sociétés occidentales ont commencé à démanteler grâce au courage de femmes et d´hommes de plus en plus nombreux à en reconnaitre l´injustesse.
Deuxième cible, les autres hommes. Dans cette course effrénée à l´existence, aiguillonnée par la peur, nos frères sont devenus concurrents ou ennemis. Nous nous battons donc aussi contre eux pour gagner notre place en groupe ou au travail et à l´échelle de la planète provoquer d´innombrables guerres qui ont tué, massacré, déporté un nombre d´êtres humains qu´il vaut mieux oublier.
Un véritable cauchemar pour nous, les autres, la planète entière.
Maintenant observez votre vie. Heureusement, vous ne vous sentez pas porteur de tant de violences. Mais prenez garde, les grandes ont l´avantage d´être facilement repérables, les petites plus difficilement. Soyez attentifs aux violences de la vie de tous les jours, les socialement admises. Elles sont les plus difficiles à déloger parce que rien ni personne, hormis vous et votre volonté de changer, ne vous oblige à y mettre fin.
Le principal piège est donc de nous accorder un blanc-seing sous le prétexte que nous ne sommes pas concernés par les violences si évidemment condamnables pour tranquillement continuer à produire nos petites quotidiennes. Mais ne vous méprenez pas, elles font tout autant de mal. Si vous voulez changer votre vie, il vous faudra les reconnaitre et chercher la peur qui se cache derrière. Alors vous pourrez commencer à désamorçer la mécanique du tandem infernal.
Encore peu d´hommes s´en donnent les moyens, beaucoup préfèrant garder leurs petites violences et prises de pouvoirs avec leurs apparents avantages. Mais ils en payent un lourd tribu. Une forme de solitude, une planète ravagée et une relation à la femme très compromise.
Vous n´êtes pas victime de votre inconscience. Vous pouvez dès maintenant agir pour mettre fin jusqu´aux plus petites de vos violences. Vous verrez, devenir un homme de paix sera aussi bon pour vous que pour le reste de l'humanité.
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